L’Odyssée familiale des Aznavourian

Arts et culture
31.07.2019

Le livre « Petit Frère » d’Aïda Aznavour, sœur du grand chansonnier, vient d’être adapté. Ce qui veut dire que la vie de Charles Aznavour et des siens sera bientôt racontée sur scène. Grâce aux efforts de l’Ambassade de France en Arménie et du Ministère de la Culture de la République d’Arménie, ainsi qu’avec le soutien du Grand Théâtre de Luxembourg, le spectacle sera monté, en octobre prochain, dans trois villes arméniennes: Erevan, Gumri et Goris. Pour en savoir davantage à ce sujet, Le Courrier d’Erevan s'est entretenu avec Armen Verdian qui est en charge de la mise en scène du « Petit Frère ».

Par Anna Baghdassarian

Il existe plusieurs livres, articles ou documentaires retraçant la vie et l’œuvre de Charles Aznavour, mais le « Petit Frère » est tout à fait différent. Il ne revient pas sur le succès que chacun connaît, mais plutôt plonge dans une odyssée singulière qui éclaire tout le siècle dernier : celle de la famille Aznavourian. Dans le livre, publié en 1986, la sœur de Charles Aznavour, Aïda relate l'Odyssée familiale depuis le Génocide arménien en Turquie de 1915 jusqu'à la fin de la Seconde Guerre Mondiale, ainsi que leur vie à Paris, sous l'occupation allemande. Du Caucase à la France, il s’agit donc d’une narration traversée par les tragédies de l’histoire du XXème siècle.

Ayant un coup de cœur pour ce texte, Armen Verdian et son équipe ont décidé un jour de s’engager dans l’adaptation du « Petit Frère ». « On avait le sentiment qu’il y avait, autour du personnage de Charles Aznavour et des siens, un matériel théâtral très intéressant. On a lu pas mal de livres écrits par Charles ou par d’autres autour de lui. Et lorsqu’on est tombé sur le « Petit Frère », il nous est apparu que c’est ça qu’on voudrait adapter. Tout d’abord parce que ce n’est pas le point de vue de Charles, c’est le point de vue de sa sœur, et sa sœur, c’est la mémoire de la famille. Elle est née seize mois avant Charles et a grandi avec lui. Ils ont été élevés comme des jumeaux. Elle avait, beaucoup plus que Charles, cette nécessitée de la narration familiale et cette nécessité de transmettre le parcours de la famille aux autres. Et puis, c’est aussi quelqu’un qui a connu la scène, qui a grandi avec Charles dès les années 30.  Ils écumaient les rues de Paris pour chanter, pour gagner leur vie. C’est une personne qui a connu tout ça, mais en même temps, qui avait un certain recul et qui est bien placée pour parler de son frère et de tous les autres personnages de la famille qui sont parfois encore beaucoup plus théâtraux que Charles », - nous raconte Armen Verdian. Il souligne que le « Petit Frère » est une véritable épopée, et dans cette épopée, on retrouve des choses qui sont extrêmement poignantes : « D’abord, on y trouve un amour inconditionnel du frère et de la sœur, duo inséparable qui semble pouvoir résister à tous les aléas de la vie. La deuxième chose qu’on voit dans cette Odyssée familiale, c’est l’amour de la scène et en même temps l’amour de la langue française qui surpassent tout. Charles comme Aïda, ont grandi avec cette évidence-là. Ils ne pouvaient qu’être sur scène, ils ne pouvaient que composer en langue française … ». Armen Verdian fait également remarquer que dans le livre, on trouve un grand élan vital, un amour de la vie. « Vous ne trouverez jamais chez Aïda la moindre plainte. Aïda, elle n’a jamais fait carrière. Elle l’aurait sans doute aimé mais elle explique que voilà, ce n’est pas grave, que sa vie est comme ça et qu’elle n’y voudrait rien changer. Elle nous transmet en quelque sorte son bonheur à elle d’avoir vécu et d’avoir donné l’amour familial ».

Bien que Armen Verdian ne connaisse pas les habitudes des Arméniens par rapport au théâtre, il sent déjà l’enthousiasme et l’intérêt des gens pour ce projet.  « Ce que je peux dire, c’est que toutes les personnes auxquelles nous avons parlé du projet et puis de l’angle choisi d’Aïda, de cette relation fraternelle très forte qui est le fil rouge du spectacle, tout le monde semblait nous encourager et même semblait être ému par la perspective, qu’on puisse vouloir creuser théâtralement ces personnages qui sont si importants pour nous », - a souligné Armen Verdian.

Grâce aux efforts de l’Ambassade de France en Arménie et du Ministère de la Culture de la République d’Arménie, ainsi qu’avec le soutien et l’appui financier du Grand Théâtre de Luxembourg, le spectacle « Petit Frère » sera monté en Arménie fin octobre :  les 21 et 22 à Erevan, le 24 à Gumri et le 26 à Goris.