« De tous temps, le théâtre a cherché à se transformer. C’est ce qu’on appelle les crises. Tant que le théâtre est en crise, il se porte bien. » -, disait Jean Vilar. Et c’est surtout ces crises qui invitent à réfléchir sur l’élaboration du nouveau et nourrissent l’imagination pour une création différente. Ainsi, il y a un an, un théâtre d’un format nouveau est né à Gumri, la ville culturelle arménienne, dans les strictes conditions sanitaires. Depuis, ce théâtre a donné plusieurs représentations, dont également quelques spectacles du théâtre de l’ombre.
Par Lusiné Abgarian
C’est Hovhannès Hovhannisyan, artiste émérite de la République d’Arménie, comédien et metteur en scène du théâtre dramatique de Gumri qui est à l’origine de la création de ce théâtre qu’il dirige actuellement. C’est avec lui que nous avons discuté de l’idéologie et du devenir de ce théâtre.
Comment est née l’idée de créer ce théâtre, quel est la préhistoire de sa création ?
D’une manière générale, cela se passe ainsi : le jeune artiste choisit pour lui-même un étalon, un artiste déjà connu et tente d’atteindre la hauteur de l’art de cet artiste ; il l’imite même souvent par inadvertance. Mais au fil du temps, s’enfonçant progressivement dans le labyrinthe impénétrable de l’art, il se rend compte que s’il est appelé à cette mission d’en haut, alors il faut devenir le critère de son temps, en créant son propre style, son esthétique, ses idées dans tel ou tel art. Ce sont ces réflexions qui ont mûri en moi et qui sont à l’origine de la création du « Théâtre des Réflexions », qui a le format de la scène libre expérimentale pour des créateurs libres et indépendants.
Comment vous avez choisi le lieu qui a accueilli le théâtre ?
Longtemps, je cherchais un lieu dans le cœur historique de Gumri qui serait en harmonie avec le théâtre déjà créé dans mon imagination. Et là, je me suis arrêté sur le bâtiment le plus célèbre de ma jeunesse, anciennement connu sous le nom de « Bar de Cognac ». Ici, lorsqu’on entre, l’environnement, l’aura, fait dégriser un instant, puis permet de s’isoler avec sa propre personne et de réfléchir sur soi-même. Tout cela est très nécessaire pour le théâtre.
Comment est venue l’idée du nom de ce théâtre : « Le théâtre des Réflexions » ? Quelle est sa vision ?
L’art, en général, est pour moi une possibilité de penser et de réfléchir, en plus des perceptions esthétiques. Quitter le monde gris et vain, être avec son imagination, ressentir le tremblement sacré de la création et penser, réfléchir sans fin. Ce sont ces réflexions qui m’ont amené à appeler ce théâtre le « Théâtre des Réflexions ».
Je suis convaincu que si le public pense à ce qu’il a vu et ressenti après chaque représentation, quelque chose va changer dans sa vie. Aujourd’hui plus que jamais, nous devons réfléchir, réfléchir et vivre, réfléchir et agir…
Par quoi ce théâtre se distingue des autres ?
Comme je l’ai mentionné plus haut, le « Théâtre des Réflexions » est au-delà de toutes les normes acceptées, il n’y a pas de frontières, toutes les normes académiques sont brisées, les cadres aussi. Bref, une scène libre pour les artistes libres.
Quel est le répertoire ?
Le répertoire est formé à partir les suggestions des metteurs en scène. Nous n’avons pas une seule ligne esthétique, ni une seule perception. Il y a un objectif clair : être libre et oser trouver le nouveau, en harmonie avec l’esprit de notre époque et de notre temps.
Qui sont les membres de la compagnie ?
La compagnie de théâtre est actuellement composée de jeunes acteurs, ils ont la possibilité de réaliser leur rêve. D’autres comédiens, qui ont déjà demandé à coopérer avec nous, seront invités dans un proche avenir. Tout est encore à venir.
Est-ce que vous envisagez de faire des tournées ? Quels sont les projets de l’avenir ?
Dans un futur proche, nous avons prévu des tournées d’abord dans les régions de l’Arménie, puis dans d’autres pays. Ainsi, nous annoncerons la naissance d’un nouveau théâtre, qui est venu pour dire son mot dans le monde théâtral.
