Nouveau clash militaire dans le Gegharkunik

Actualité
28.07.2021

Inhabituellement laconique et volontairement imprécis, le communiqué officiel du Ministère de la défense ce matin ne manque pas d'inquiéter. Et pour cause. Selon des sources officielles, les combats "dans le Nord-Est" se dérouleraient toujours à l'heure où nous publions cet article, dans la région de Vardenis -province du Gegharkunik- autour du hameau Verin Shorzha. Il y aurait, côté arménien, 3 morts et 3 blessés, de même, 3 postes militaires seraient tombés. Rappelons que les troupes azéries y avaient pris position le 12 mai dernier et n'en sont jamais reparties. Des "gardes-frontières" annonçaient Bakou et Yerevan…

Par Olivier Merlet

Dans le même temps au sud du pays, à Yeraskh, frontalière avec le Nakhitchevan (mais aussi de la Turquie et de l'Iran) on assisterait depuis les échanges de tirs nourris en début de semaine dernière, à une concentration massive des forces azéries.  Moins de 100 kilomètres séparent Vardenis de Yerask, la route qui les relie coupe l'Arménie de part en part. Son occupation placerait de fait sous contrôle azéri, tout le plateau du Syunik depuis Martuni et l'est du lac Sevan jusqu'au Nakhitchevan en passant par Yegheghnazor.

Le lieutenant-colonel Danny Pith, attaché de défense de France pour la région du Caucase en Géorgie, Arménie et Azerbaïdjan était en visite hier, mardi, à Yerevan. Il revenait de Bakou et devait repartir dans la journée de ce mercredi. Hier après-midi de même, des avions militaires ont effectué des survols réguliers de la capitale jusqu'en début de soirée, clairement entendus par les habitants du centre-ville. À propos ou simple coïncidence, exercices ou opérations militaires en cours, il semble qu'aucune communication officielle ne s'en soit fait l'écho.

Archak Karapetyan, Ministre arménien de la défense tout fraichement nommé, suite à une conversation téléphonique avec son homologue russe Sergueï Choïgou lundi 26, assisterait en ce moment même à une réunion tripartite à Moscou à laquelle participerait également Zakir Hasanov, Ministre de la Défense azerbaidjanais et General colonel commandant en chef de la seconde guerre du Karabakh.

On se souvient que les échanges de feu nourris, la semaine dernière à Yeraskh, avait eu lieu alors qu'Ilham Aliyev s'entretenait avec Vladimir Poutine de la résolution du tracé des frontières. De même, l'entrée des troupes azéries sur le territoire souverain de la République d'Arménie en mai dernier avait clairement pour objectif de faire monter la tension en Arménie à l'approche des élections.

Certaines sources voient dans ces derniers événements les prémices d'une offensive majeure Nord-Sud, Gegharkunik-Nakhitchevan, qui couperait le pays en deux, d'autres estiment cyniquement que Bakou prend désormais l'habitude de soutenir d'actions militaires violentes toute négociation diplomatique.

Dans un entretien vidéo à nos confrères de News.am, l'ambassadeur de France Jonathan Lacôte fait part de son inquiétude et celle de la France au regard de "la dégradation continue de la situation aux frontières de l'Arménie". Il appelle à une reprise du processus politique, "processus de bonne foi qui ne saurait être mené sous la contrainte ou la force". Il rappelle également que "des contacts ont lieu entre la France, la Russie et les États-Unis, dans le cadre de la coprésidence du groupe de Minsk pour contribuer dans un premier temps à l'apaisement des tensions et le moment venu, à la reprise d'un processus politique. Notre préoccupation immédiate reste bien sûr la situation aux frontières de l'Arménie, sans préjudice des autres points de l'accord du 9 novembre qui font encore l'objet de contentieux, notamment de la nécessité de libérer tous les prisonniers détenus en Azerbaïdjan".