Arman Tatoyan - le verbe et le droit contre l'inacceptable

Opinions
25.01.2023

Un an après avoir quitté ses fonctions d'Ombudsman de la République d'Arménie, Arman Tatoyan parle du combat qu'il continue de mener, juridique et acharné, contre les crimes de l'Azerbaïdjan. Il répond aussi aux questions du Courrier d'Erevan sur les ambitions politiques que beaucoup lui prêtent en Arménie. Une interview exclusive en deux chapitres dont nous vous présentons le premier sous ces lignes.

Propos recueillis par Olivier Merlet

À l'échéance de son mandat de défenseur des droits de l'homme - l'Ombudsman de la République d'Arménie - Arman Tatoyan est resté l'une des personnalités les plus en vue de la scène publique arménienne - publique et politique, quoi qu'il en dise -. Près d'un an après avoir quitté ses fonctions, il dirige aujourd'hui une fondation qui porte son nom et dont la mission s'inscrit dans la naturelle et logique continuité du travail qu'il mène depuis 2016 au service des droits de la personne en Arménie. Ses actions souvent saluées lui ont valu une très large reconnaissance, de la rue arménienne jusqu'aux couloirs des plus hautes instances juridiques et humanitaires mondiales.

Juriste de formation, diplômé de l'Université d'État d'Erevan en procédure pénale et criminelle, de l'Université de Pennsylvanie dont il est reconnu membre émérite, distingué par l'association Penn Law honorant les carrières remarquables, Arman Tatoyan accepte le poste de vice-ministre de la justice du gouvernement Sargsyan en 2013, « un poste non-politique à l'époque » rappelle-t-il. Nommé Ombudsman au printemps 2016, il s'illustre notamment pendant la guerre des 44 jours, en rassemblant et documentant 287 preuves vidéo objectives montrant tortures, décapitations et démembrements des captifs arméniens, civils et militaires, par les soldats de Bakou.

En parallèle aux activités de sa fondation, Arman Tatoyan dispense également des cours à l'université d'État et l'université américaine d'Erevan ainsi qu'à l'Académie de justice d'Arménie. Certains en Arménie lui prête des ambitions politiques vers les plus hauts sommets de l'État…

 

En quoi consiste votre travail aujourd'hui ?

La Fondation Tatoyan dont je m'occupe a démarré ses activités le 20 septembre 2022, c'est une fondation apolitique et une organisation à but non lucratif. Notre mission concerne la promotion et la protection des règles de droit en démocratie et les droits de l'homme, tout en cherchant à démontrer le rapport intime de ces concepts à la notion de sécurité. Ils ne se contredisent pas mais se complètent.

L'un de nos principaux objectifs est également de documenter les crimes de guerre azerbaïdjanais - crimes contre l'humanité - et de surveiller la situation aux frontières des régions d'Arménie. Nous menons des travaux liés aux problèmes auxquels est confronté l'Artsakh, la protection des droits de l'homme et les questions de sécurité locale.

Nous nous attachons enfin à rassembler des preuves, analyser les éléments afin de les présenter à la communauté internationale pour exposer la situation réelle, telle qu'elle est vécue sur le terrain, car nous sommes bien conscients que l'Azerbaïdjan falsifie les faits et les preuves. Notre objectif est de ne pas permettre cette falsification et faire en sorte que nos partenaires internationaux sachent ce qui se passe réellement ici.

Et plus précisément, en ce qui concerne le Karabagh ?

De la même façon, nous recueillons des preuves. Nous sommes actuellement en train de finaliser un rapport sur les enfants séparés de leurs familles.

Vous avez du personnel sur place ?

Nous avons des ONG partenaires et collaborons également avec le défenseur des droits de l'homme d'Artsakh qui nous fournit des informations de première main, des preuves et des faits. Nous les rassemblons et préparons notre rapport en y rajoutant notre analyse de la situation.

Nous travaillons aussi sur une demande que nous soumettrons aux organisations internationales concernant ces soit-disant éco-activistes qui bloquent le corridor de Latchin, afin de réclamer leur départ et montrer qu'ils ne sont en aucun cas ceux qu'ils prétendent mais des militaires, des soldats actifs, d'anciens militaires financés et soutenus par le gouvernement azerbaïdjanais. Tout est organisé. Nous avons déjà identifié plus d'une centaine d'entre eux et dressé leur profil individuel. Nous avons aussi découvert que nombre d'entre eux appartiennent à ce qu'on appelle "les Loups gris", une organisation terroriste ultra-nationaliste, qui a d'ailleurs été interdite par le gouvernement français lors de la guerre des 44 jours.

Cette organisation est turque, je crois, et non azerbaïdjanaise.

À l'origine, elle était turque, constituée pour attaquer les Arméniens, les Assyriens et les Grecs, toutes les communautés chrétiennes de l'Empire ottoman. Aujourd'hui, elle est également très active en Azerbaïdjan.

Lorsque vous parlez de "sécurité par la démocratie et les droits de l'homme", qu'entendez-vous exactement ? Dans quelle mesure la démocratie et les droits de l'homme sont-ils nécessairement garants de la sécurité ? 

Vous ne pouvez pas isoler les Droits de l'homme des questions de sécurité, vous ne pouvez pas l'en détacher. La sécurité de l'Arménie commence dans nos régions frontalières, n'est-ce pas ? Des gens vivent dans ces régions frontalières, des gens normaux, ordinaires. Et que leur arrive-t-il, en particulier à Syunik, Gegharkunik et Vayots Dzor ? Ils ne peuvent plus utiliser leurs propres terres, les terres arables, les prairies, et jusqu'à leurs propres habitations. À cause de la présence des soldats azerbaïdjanais, ces gens n'ont plus la possibilité de les habiter ni de cultiver leurs terres.

Dans la province de Syunik par exemple, les forces armées azerbaïdjanaises contrôlent toutes les routes à proximité immédiate des villages et ne laissent aucune possibilité aux populations de mener des travaux agricoles dans les environs: C'est-à-dire d'avoir un revenu, de gagner de l'argent pour nourrir leur famille. Les gens ne peuvent pas s'approcher, ils ne peuvent pas se déplacer librement, leur liberté de mouvement est bafouée.

Les Azéris occupent actuellement en Arménie une superficie de terres arméniennes équivalente à celle d'Erevan, c'est énorme. Une zone qui appartient à ses habitants arméniens, par certificat, par droit de propriété, mais dont on leur interdit la jouissance.

C'est pourquoi je redis encore que les questions de sécurité sont très étroitement liées aux droits de la personne, à l'être humain et aux questions humanitaires.

Et en ce qui concerne la démocratie ?

La démocratie parce que les gens devraient avoir le droit, par exemple, de participer à la délimitation des frontières; la population locale, j'entends. Selon les standards de l'OSCE ou de l'ONU, l'un des premiers critères de ce processus de délimitation dit qu'il ne doit en aucun cas violer ou aller à l'encontre des usages coutumiers locaux et qu'il est établi dans l'intérêt des populations locales.

A l'heure actuelle, les soldats azerbaïdjanais sont installés dans leurs positions de combat, pas seulement aux frontières mais à l'intérieur du territoire arménien. Comment les civils pourraient-ils prendre part à ce processus ?

Bien sûr, je ne parle pas des négociations de délimitation, qui ne sont possibles à ce stade qu'au niveau de l'État. Je parle de l'ensemble du processus. Il ne peut être mené à bien sans la participation de la population sur le terrain.

Il y a deux mots à prendre en compte dans cette affaire :

le premier, c'est "délimitation", c'est-à-dire l'étape qui consiste à décrire les frontières et à en établir des cartes. L'autre mot c'est "démarcation", c'est-à-dire les, les bornes, les repères et tout l'équipement utilisé sur le terrain pour marquer ces frontières,

non seulement en fonction des cartes topographiques, mais aussi des cartes forestières, des plan d'eaux et surtout du cadastre. Ce dernier point est très important. Lors d'un précèdent entre la Croatie et la Slovénie qui n'arrivaient pas à s'entendre sur la délimitation de leur frontière, les parties ont eu recours à la documentation cadastrale relative aux habitations pour savoir où cette frontière devait passer, dans le respect des propriétés riveraines.

Pour l'instant, les négociations se déroulent uniquement au niveau politique. Mais l'Azerbaïdjan ne cesse de menacer l'Arménie, au mépris de toutes les conventions internationales selon lesquelles un processus de délimitation doit se dérouler dans des conditions exemptes de toute agression, même verbale, rien. Pourtant, dans une récente interview du 10 janvier, le président de l'Azerbaïdjan a littéralement déclaré : « les frontières passeront par là où nous le dirons ». Il s'agit très objectivement d'une agression verbale ouverte, d'une menace par les mots en contravention flagrante des dispositions internationales.

Croyez-vous à l'imminence d'une nouvelle guerre ? Croyez-vous que par ses récentes déclarations, dernières en date d'une longue série de la même veine, Aliyev prépare en fait le terrain d'une nouvelle agression militaire contre l'Arménie ?

C'est tout au moins ce qu'il démontre par son discours. Sa conférence de presse du 10 janvier était très claire. Alors, passera-t-il de la parole aux actes ? Puisqu'il reste impuni, libre de commettre ses crimes de guerre et ses agressions sans être inquiété, sans sanction politique sans sanction économique, sans sanction personnelle.... Alors, bien sûr, personne ne peut l'exclure.

L'Arménie peut-elle empêcher une nouvelle guerre?

Nous devons l'empêcher: Et pour cela, nous devons travailler en étroite coopération et avec l'aide de la communauté internationale. Malheureusement, l'Azerbaïdjan et la Turquie sont influents dans le jeu géopolitique mondial et savent utiliser les intérêts économiques pour freiner les soutiens à l'Arménie. À l'Arménie et à l'Artsakh, j'insiste, car il s'agit d'un tout.

La politique actuelle de l'Azerbaïdjan à l'encontre de l'Artsakh n'est pas isolée, c'est la même qui vise également l'Arménie

et nous pouvons établir de nombreux parallèles entre elles : les mêmes signaux et la même tactique.

L'Artsakh est actuellement soumis au blocus, mais en Arménie, les routes ont également été bloquées à deux endroits en 2021. Du 12 au 14 et du 15 au 17 novembre, l'axe Goris-Vorotan et Kapan-Chakaten a été bloqué de la même manière. Les mêmes fusillades. Aujourd'hui, l'Artsakh est visé de manière plus agressive. L'approvisionnement en gaz est à nouveau coupé, l'électricité… La population de l'Artsakh est dans une situation désastreuse. Les soldats de la Paix et la Croix Rouge continuent à pouvoir fournir une certaine aide humanitaire, mais en hiver, par ces températures, sans gaz ou sans électricité, et donc sans connexion, je ne peux pas l'imaginer.

Vous associez la Turquie et ses "jeux géopolitiques", comme vous l'avez dit, à cette politique de l'Azerbaïdjan.

Nous n'avons pas le droit d'oublier que les officiels turcs ont officiellement admis avoir soutenu l'Azerbaïdjan pendant la guerre des 44 jours. Ils ont financé et organisé le transfert vers l'Artsakh de mercenaires qui y ont commis des crimes de guerre. Des militaires turcs étaient également sur place pour former l'armée azerbaïdjanaise. Ses forces spéciales, les commandos appelés "Yashma", bien connus pour la cruauté qu'ils ont à nouveau démontrée lors de la récente guerre, ont suivi des formations spéciales en Turquie. La jeune femme soldat, exécutée après avoir été atrocement mutilée en septembre dernier, ce sont eux.

Le 10 décembre 2020, juste après la guerre, Le président de l'Azerbaïdjan a organisé une parade militaire à Bakou. Le président turc y a participé, comparant cette guerre au génocide et aux pogroms d'Arméniens en Azerbaïdjan au début du XXème siècle. Il a même rendu hommage à Enver et Nuri Pacha ainsi qu'à d'autres qui ont organisé et perpétré ces génocides.

Ils ne voient aucune différence, ils pensent les choses de la même manière, il y a là une logique. Et, quoi que fasse l'Azerbaïdjan maintenant, elle est toujours et fermement soutenue par la Turquie. « Deux peuples mais un seul État », comme ils disent.

Aujourd'hui, la situation semble toutefois différente de ce qu'elle était il y a deux ans. La Turquie manifeste de plus en plus d'intérêt pour l'ouverture des échanges commerciaux avec l'Arménie, et par ailleurs, Erdogan est en pleine campagne pour sa réélection.

Oui, mais je viens de le dire : « nous n'avons pas le droit d'oublier ». Effectivement, je pense que l'Arménie ne peut pas rester isolée.

Nous devons développer nos relations extérieures. Nous ne vivons pas dans un appartement que vous pouvez vendre et déménager dans un autre.

Non, c'est notre patrie, nous vivons ici. Nous devons développer notre pays et vivre en paix, avec nos voisins tout d'abord. Deux d'entre eux malheureusement, l'Azerbaïdjan surtout qui nous considère comme son plus grand ennemi et le souligne au niveau de l'État, entretiennent la haine et l'arménophobie... Nous devons prendre en compte l'attitude de certains pays à notre égard.

Pour en revenir aux parallèles que vous établissez entre l'Arménie et l'Artsakh, il y a au moins une différence cependant : c'est le statut sous lequel le droit et la communauté internationale considèrent ces deux territoires.

D'accord... Premièrement, l'Azerbaïdjan occupe actuellement une partie du territoire souverain de l'Arménie au Syunik, à Gegharkunik et dans le Vayots Dzor. Deuxièmement, lorsque nous parlons de la politique de l'Azerbaïdjan envers l'Arménie et l'Artsakh, quelle en est l'essence ? Nous parlons des mêmes choses : de nettoyage ethnique, de haine, d'arménophobie. Si vous allez dans ces villages du Syunik, de Gegharkunik et de Vayots Dzor, la situation est la même qu'en Artsakh, les gens ne sont plus chez eux. En septembre dernier, en l'espace de deux jours, nous avons eu près de 2000 personnes déplacées en Arménie. Oui, le territoire de l'Artsakh est contesté - il y a eu des erreurs de procédure dans les négociations, toutes ces choses-là - mais l'Arménie est un territoire souverain. Lorsque vous vous penchez sur le contenu et pas seulement sur la forme de cette politique azerbaïdjanaise, c'est la violation constante des Droits de l'homme et la souffrance des populations. Que ce soit pour l'Arménie ou pour l'Artsakh, c'est la même chose.

Pensez-vous que l'Arménie puisse encore aider le Karabagh à rester indépendant ou du moins à préserver son existence ?

En ce qui concerne le Nagorno-Karabagh, nous avons deux questions liées : l'une immédiate, celle de l'ouverture du corridor, la seule route qui le relie à l'Arménie, cruciale et prioritaire,  l'autre, à plus long terme, qui consiste à s'assurer et garantir que s'ils ouvrent la route demain, ils ne la refermeront pas dans les semaines suivantes. C'est exactement là que le droit international peut et doit être efficace. Malheureusement, de nombreux principes du droit international ne fonctionnent pas ici.

Les Nations Unies ont un célèbre slogan qui dit : « Personne ne doit être laissé de côté, aucun droit de l'homme ne doit être ignoré ». Peu importe qu'un territoire soit un État reconnu ou non, les personnes qui y vivent ont un droit, les Droits de l'homme sont universels. Malheureusement, la communauté internationale n'a pas accès à ce territoire et ne peut pas y aller. Et d'ailleurs, elle n'y est jamais allée. Et que voyons-nous maintenant ? Une violation massive des Droits de l'homme.

Nous devons porter tous ces éléments à la connaissance de la communauté internationale afin qu'elle reconnaisse ses propres responsabilités vis-à-vis des règles qu'elle a adoptées. Sa responsabilité est engagée.

Il existe un précédent sur la scène internationale, en Bosnie-Herzégovine en 1992, lorsque le Comité international de la Croix-Rouge a réclamé officiellement la création de zones de sécurité protégées visant à mettre à l'abri les populations des risques de nettoyage ethnique. Ces zones spéciales de sécurité devraient être immédiatement créées en Artsakh pour mettre fin aux souffrances des gens. Notre objectif premier et immédiat en ce moment est la protection de la population civile et indigène, je le souligne, du Nagorno-Karabagh.

Je vous repose la question : l'Arménie peut-elle aider le Karabagh en ce sens?

L'Arménie doit utiliser tous les moyens possibles pour promouvoir ce concept. Vous savez, je comprends que les questions géopolitiques sont une chose, mais le gouvernement arménien a l'obligation constitutionnelle de tout faire pour protéger la population civile. Donc, il doit le faire. Il peut utiliser les moyens qu'il veut, mais il doit le faire. C'est son engagement et son obligation.

De quels leviers concrets dispose-t-il?

Ils sont nombreux, à commencer par la Cour internationale de justice, les plateformes internationales, la consultation, la négociation ... Au moins, doit on les utiliser et prendre des mesures. Vous savez, les petits pays en particulier doivent utiliser ces instruments internationaux qui existent s'ils ne veulent pas devenir victimes ou otages du grand jeu géopolitique. C'est très important.

J'ai tout le temps dit aux responsables de ce pays: « vous êtes là pour utiliser tous les faits survenus sur le terrain, pour faire savoir et utiliser tous les instruments afin d'obtenir le soutien de la communauté internationale ». Mais bien sûr, nous devons renforcer notre propre gouvernement, notre propre pays, c'est aussi très important. En tant que citoyen de ce pays, en tant que personne à la tête de cette importante fondation, je vois les perspectives qui nous sont offertes, je vois les moyens de les atteindre et je pense qu'il relève du devoir constitutionnel de travailler à ces obligations en utilisant tous les moyens possibles.

Pensez-vous que l'Arménie puisse encore, un jour, rattacher à elle le Karabagh ?

Je ne parle pas pour l'instant de rattachement. Encore une fois, notre objectif immédiat en ce moment est la protection des civils.

Mais ce qui se passe prouve également que dans la situation présente, le droit à l'autodétermination est menacé et renforce la position selon laquelle ces personnes ne peuvent pas vivre sous le contrôle de l'Azerbaïdjan. Ils seront tués immédiatement, torturés, exterminés. Il s'agit d'une menace existentielle. Ce blocage du corridor par l'Azerbaïdjan, la coupure du gaz, de l'électricité, tout cela signifie que ces personnes sont menacées et ne peuvent avoir aucune relation avec le gouvernement d'Azerbaïdjan ou que le gouvernement d'Azerbaïdjan ne peut avoir de relations avec elles parce qu'il les exterminera. C'est pourquoi ces personnes ne peuvent faire partie de l'État d'Azerbaïdjan et ne peuvent pas non plus être déplacées. Il s'agit d'un peuple indigène, qui vit là depuis des centaines et des centaines d'années. Ne serait-ce que pour cette raison, Il devrait être reconnu.

Vous êtes juriste, vous travaillez dans le cadre de la loi et des règles du droit international, mais lorsque vous voyez la réalité de ce qui se passe sur le terrain, y croyez-vous toujours ?

Oui, j'y crois. Mais les acteurs internationaux, les pays occidentaux en tête car ce sont eux qui ont développé ce système - tout ce dont nous disposons aujourd'hui en termes de droit international a été créé par eux -, doivent résolument s'y engager.

Malheureusement, les intérêts économiques et géopolitiques ne permettent pas à ce système de fonctionner correctement. Cela ne signifie pas que nous devions abandonner. Nous devons continuer à y travailler avec eux et de plus en plus, en utilisant ce système et tous ses instruments , parce que nous n'avons pas d'autre choix. Nous ne pouvons pas continuer à dire que ça ne marche plus pour nous, non. Nous devons tout mettre en œuvre, lutter pour notre existence, surmonter tous nos problèmes, nous n'avons pas le choix. C'est la seule possibilité, le prix à payer de l'échec de notre gouvernement et de la préservation de notre État. Je me considère comme un homme d'État et je pense que l'État est la chose la plus importante que nous devions protéger aujourd'hui.