"Influence et Contre-action", un monument dédié aux victimes du 1er mars inauguré à Erevan

Arts et culture
02.03.2023

Le lieu de mémoire des victimes des émeutes du 1er mars 2008 à Erevan héberge quinze ans plus tard un monument inauguré hier, 1er mars 2023, à l’entrée du parc des Enfants, adjacent à la rue Grigor Lusavorich. Intitulé "Influence et Contre-action", il est l'œuvre du sculpteur Albert Vardanyan.

Par Lusine Abgaryan

 

12 projets avaient été soumis au concours général en 2020 pour le monument à la mémoire des victimes du 1er mars. Les concurrents avaient pour tâche de limiter la composition idéologique du monument à la combinaison des contours des corps, excluant des similitudes de visages. À travers des symboles sculpturaux et des solutions structurelles du matériau, La sculpture en relief d’Albert Vardanyan, de bronze et de pierre, porte la mémoire et ramène le spectateur aux jours tragiques de mars 2008.

Sous forme de diptyque avec un certain effet de miroir, l'œuvre évoque de manière métaphysique la séparation du pouvoir et du peuple. « Je ne peux pas en parler avec des mots », dit le sculpteur Albert Vardanyan, se limitant à évoquer la forme abstraite qui lui a permis d’incarner l’idée de la dichotomie entre les deux forces.

Les sensations qui ont guidées l’artiste durant ces deux années de création étaient diverses. Ayant traversé la pandémie puis la guerre, la sculpture semblait céder sa priorité à d’autres problématiques. « Il y avait une déception », reconnaît l’artiste, pour qui il était difficile d'ignorer les autres événements de l’actualité. « Ce n'était pas le bon moment pour cette sculpture », soupire-t-il. Mais les sujets de la résistance, de l’opposition, de l’impact et de la réaction lui étant très proches, il ne pouvait pas abandonner ce projet. « J’ai toujours fait des sculptures quand il y avait une manifestation, je les ai gardé dans ma collection personnelle », confie le sculpteur engagé. 

Les proches des victimes, le premier Ministre, le président de la République et celui de l'Assemblée nationale, le maire d'Erevan et son premier adjoint ont participé à la cérémonie d'inauguration.

Dans son discours, le premier ministre Nikol Pashinyan a tenu à souligner que le 1er mars n’etait pas un jour de deuil et s'inscrivait dans un contexte beaucoup plus large, bien que nous pleurions nos citoyens tombés ce jour-là. « Immédiatement après les élections législatives de 2021, j'ai eu l'occasion de dire sur diverses plateformes que pour la première fois dans l'histoire de l'Arménie, les élections n'étaient pas la cause mais le moyen de surmonter la crise politique interne. C'est également mon ressenti personnel des événements du 1er mars 2008, dans lesquels, vous le savez, j'ai été personnellement très impliqué. En réalité, le 1er mars 2008 parle du manque ou de l'absence de la démocratie. Il s'est agit ce jour-là d'entraver et de briser le libre arbitre du peuple, de le priver de la possibilité de s'exprimer et de prendre des décisions. C'est exactement ainsi qu'il faut percevoir le 1er mars. Et au moins à cet égard, la lutte et les sacrifices du 1er mars ont atteint leur objectif, car aujourd'hui, la falsification des élections en République d'Arménie est une page tournée sur laquelle il n'y aura pas de retour. Et je veux dire que son garant n'en est ni le gouvernement, ni aucun parti, ni aucune autorité, son garant est le peuple de la République d'Arménie, qui a finalement ajusté et affiné ses objectifs au cours des 30 années de son indépendance et d'existence de l'État. Et son objectif est la celui d'une vie libre et créative dans un État indépendant, souverain et fort, la vision de d'une vie libre et heureuse », a conclu le Premier ministre.