COVID-19 : vaccin à marche forcée!

Société
20.09.2021

Erevan a remis son masque ! Il ne faut rien exagérer quand même, mais que ce soit dans les transports, les centres commerciaux ou les grands magasins, le phénomène est notoire. Il faut dire que l’augmentation régulière des cas de Coronavirus au cours de l’été (670/jour en moyenne hebdomadaire au 15 septembre, pour moins d’une centaine début juillet), et l’identification sur le territoire arménien de sa variante Delta, particulièrement contagieuse, n’ont pas manqué d’inquiéter.

Par Olivier Merlet

Si l’on peut parler d’effet "positif" de cette quatrième vague, c'est sans doute de la prise de conscience progressive de la nécessité de devoir se faire vacciner. La rapidité inédite de la mise au point des premiers vaccins et leur arrivée sur le marché moins d'un an après l'éclatement de la pandémie mondiale avait laissé dubitatif une bonne partie de la population. La polémique autour de celui développé par la société Astra Zeneca, alors seul disponible en Arménie et responsable de quelques rares cas de complications fatales n'avait pas arrangé les choses. De surcroit, le pays sortait de la guerre, davantage préoccupé par d'autres bilans et pertes humaines. Les Arméniens trainaient des pieds pour aller se faire vacciner, à tel point que pour écouler des doses en passe de péremption, leur distribution fut autorisée à tout individu de passage sur le territoire national, gratuitement et sans restriction. Les choses ont changé.

« Au lancement de la campagne, début avril, si nous avions 50 candidats par jour à l'injection, c'était un maximum. Aujourd'hui, c'est plus de 6000 et le chiffre continue d'augmenter ». Gayane Sahakyan, Directrice adjointe du Centre national de contrôle des maladies infectieuses, émanation directe du Ministère Arménien de la Santé, suit de près les indicateurs statistiques. Elle reprend ceux d'un récent sondage mené au téléphone par un institut américain (l'International Republican Institute) sur un échantillon représentatif de 1500 personnes de la société arménienne. 41% d'entre eux font part de leur intention d'aller se faire vacciner, ils n'étaient que 7% en avril.

Malgré tout, le passage à l'acte reste difficile, avec de nombreuses disparités selon les régions. Au 12 septembre (derniers chiffres publiés à la date du 18 septembre), seuls 11% des personnes en âge de se faire vacciner (au-delà de 18 ans) ont reçu leur première dose, soit un peu plus de 7% de la population arménienne et seulement 4,10% le sont complètement. L'objectif des 50% de vaccinés à la fin de l'année semble encore difficile à atteindre d'après les modélisations effectuées marz par marz. par les experts du Ministère. Or, depuis l'apparition des nouveaux variants, le sésame des 60% de vaccinés, la fameuse "immunité collective", a été revu à la hausse : elle est aujourd'hui estimée à 85%.

Le gouvernement a donc décidé de mettre les bouchées doubles en adoptant une mesure dont le moins que l'on puisse dire est qu'elle fait débat. À compter du 1er octobre, la décision gouvernementale N65N prévoit de rendre obligatoire dans toute institution publique ou privée, de la grande administration d'état à la moindre affaire personnelle, le dépistage systématique et bimensuel de la maladie pour tous les employés, exception faite des personnes vaccinées, même partiellement, des femmes enceintes et des sujets présentant une contre-indication médicale. Les personnes ayant déjà été infectées n'échappent pas à la règle.

Gayane Sahakyan explique : « En Arménie, même pour les vaccinations de routine, il n'existe encore malheureusement aucun texte de loi encadrant ou contraignant à leur distribution. Nous ne pouvons agir, organiser un calendrier national, comme pour certaines maladies infantiles par exemple, uniquement sur décret gouvernemental. Pour cette infection à Coronavirus, il n'y a rien non plus, nous avons pourtant la responsabilité de définir une stratégie. Un texte existe, intitulé "Sécurité sanitaire et antiépidémique de la population Arménienne" qui autorise le gouvernement, sur simple décision, à lancer une campagne massive de vaccination et à prendre toutes les mesures nécessaires à combattre une pandémie ou toute autre situation sanitaire d'urgence ».

Gayane Sahakyan ne cache pas que l'idée est bien sûr de pousser à la vaccination. « Mais le libre-arbitre du citoyen est respecté. L'État prend à sa charge financière la vaccination, la prophylaxie de la maladie, sa prévention, et une grande partie du coût des soins en cas d'infection. Les tests, eux, sont payants, c'est au citoyen d'en assumer la charge. Libre à lui de savoir s'il préfère se faire vacciner ou s'acquitter régulièrement de ces frais. »

Aucune sanction n'est encore prévue en cas de refus de se faire tester. Elles seraient à l'étude sur le bureau du Premier Ministre et de celui des finances. Rappelons que le vaccin est gratuit contre 15 000 Drams pour un test, soit 30 000 par mois, selon les établissements qui le pratiquent.