"Starmus VI ou 50 ans sur Mars", un festival interplanétaire et inédit en Arménie

Société
05.09.2022

C'est l'évènement culturel et scientifique de cette rentrée : ce lundi 5 septembre et jusqu'au 10, l'Arménie se met à l'heure des étoiles et d'une aventure astro-psychédélique inédite de dimension exceptionnelle, celle du festival "Starmus", sixième du nom, intitulé 50 ans sur Mars.

Par Olivier Merlet et Lusine Abgaryan

Festival scientifique et artistique de renommée mondiale destiné à la communication scientifique à destination du grand public, Starmus décline la science et les astres à travers l'art et surtout la musique, dans le but d'inspirer et d'éduquer les prochaines générations d'explorateurs, de chercheurs ou de pionniers et régénérer en eux l'esprit de découverte.

La rencontre des sciences et de la musique

Starmus ("étoiles" et "musique", bien sûr) est né, comme bien souvent, d'une rencontre : celle en 2007 d'un astrophysicien arménien, Garik Israelian, premier témoin visuel de la formation des trous noirs, et de Brian May, le guitariste-rock du groupe légendaire des Queen. Car avant de former avec Freddy Mercury, l'un des plus célèbre duos voix-guitare rock de tous les temps, Brian May lui aussi se passionnait pour l'astrophysique. Étudiant brillant, il soutient avec succès, en 1974, une thèse sur la poussière zodiacale dans le système solaire. Le succès des Queen fera briller pour lui d'autres étoiles, jusqu'en 2007, lorsque le docteur en astrophysique décide de reprendre ses études à l'Imperial College de Londres. Son maitre de stage n'est autre que Garik Israelian, fan invétéré des Queen. De leurs échanges et de leur amitié naitra le Starmus Festival, dont la première édition se déroulera quatre ans plus tard, à Tenerife, aux Canaries, sur les pentes du Mont Teide où se perche l'un des plus fameux complexes d'observation astronomique de la planète.

Le festival est souvent décrit comme l'événement au cours duquel « les plus grands esprits de l'exploration spatiale, de l'astronomie, de la cosmologie et des sciences planétaires se réunissent pour une semaine de discussions incroyables, de partage d'informations et d'appréciations de la connaissance que nous avons de l'espace et de l'univers », affirme Garik Israelian. Depuis 2011, chaque édition de Starmus réunit des lauréats du prix Nobel, des astronautes, des inventeurs, bref, les esprits les plus brillants de la science, de l’art et de la technologie. Après Tenerife à trois reprises, le quatrième festival Starmus s'est tenu à Trondheim en Norvège, puis à Zurich, en 2019.

L'Arménie, fleuron de la recherche interstellaire

Le choix de la petite Arménie pour cette 6ème édition ne relève pas seulement du souhait de son organisateur d'honorer le pays qui l'a vu naitre : l'Arménie est aussi -et demeure- l'un des hauts-lieux historiques de l'observation et des découvertes astronomiques. Foyer du programme spatial soviétique pendant toute une partie du 20e siècle, elle reste aujourd'hui un lieu clé pour la communauté internationale avec l’observatoire astrophysique de Byurakan, la station Aragats et sa contribution à l’astronomie, à l’astrophysique et à l’exploration spatiale. Garik Israélien précise : « L’Arménie a joué un rôle extraordinaire dans le passé, le présent et l’avenir dans la façon dont nous comprenons et explorons notre univers. Starmus va permettre à un extraordinaire éventail de penseurs et de créateurs de rencontrer cet endroit spécial et partager des idées ».

Starmus VI est dédié au 50e anniversaire du premier "atterrissage" sur Mars de la sonde spatiale soviétique "Mars 3". Cette mission avait permis en 1971, le lancement sur le sol martien du rover Prop-M, mis au point par l'ingénieur arménien Alexandre Kemurdzhian. La communication avec le robot n'avait duré que 110 secondes, mais c'était une première planétaire. 50 ans plus tard, à Erevan les festivités s'étaleront sur toute une semaine.

Un programme exceptionnel

Coté sciences, ce sont plus de 40 intervenants qui donneront des conférences ou animeront des débats, parmi lesquels quatre prix Nobel : Kip Thorne, Emmanuelle Charpentier, Donna Strickland et Edward Moser, six anciens astronautes dont Chris Hadfield, premier Canadien à avoir exécuté une sortie extravéhiculaire et à avoir commandé la Station spatiale, Charlie Duke, d'Apollo 16, le plus jeune homme, en 1972,  à avoir marché sur la lune, Jim Bagian, d’origine arménienne, Charles Bolden, George Neild et Charlie Duke. On notera encore la participation de Tony Fadell, l'inventeur de l'IPod et de Brian Greene, physicien et grand vulgarisateur scientifique.

Deux conférences majeures sont au programme : "Découvrez le cosmos et changez le monde" et "Space Technologies - Technologies spatiales d'aujourd'hui et de demain". Elles se tiendront toutes deux au Palais des sports et des spectacles Karen Demirchyan, qui accueillera également la cérémonie de remise de la médaille Stephen Hawking pour la communication scientifique, reconnue comme "l'Oscar" de la vulgarisation scientifique. Des lectures seront par ailleurs organisées au sein des universités et des centres de formation de toute l'Arménie pour permettre à leurs etudiants de débattre avec un grand nombre de scientifiques de renommée mondiale.

Accessible à tous publics, le festival s'adresse aussi aux enfants avec un "Science Camp" érigé sur la place de la Liberté jouxtant l'Opéra d'Erevan. Véritable centre scientifique et technologique à grande échelle,il accueillera petits et grands dans des pavillons thématiques, pour assister à des présentations et des démonstrations des dernières innovations scientifiques et technologiques en astrophysique, physique laser, conception de drones, robotique ou encore en intelligence artificielle.

La scène musicale de Starmus se pose comme la pierre angulaire du festival, son "liant", qui permet d'attirer et de fédérer autour de la science un large public que le discours scientifique pourrait laisser indifférent. Vulgariser, rendre la science attrayante grâce à l'art et la musique… Sonic Universe, le premier des grands concerts prévus, réunira dans un genre tout à fait éclectique le groupe de rock "Sons of Apollo", Rick Wakeman, claviériste flamboyant, ancien des Strawbs et de Yes, Serj Tankian, le chanteur arméno-américain de "System of a Down", Tigran Hamasyan, pianiste de jazz, Andrey Makarevich, fondateur de "Machina Vremeni", le plus ancien groupe de rock progressif de Russie et l'Orchestre Philharmonique National d'Arménie .

Le mercredi 7 septembre, point d'orgue de ce programme, Brian May dirigera le concert "Un autre monde", au cours duquel se succèderont rien de moins que douze chanteurs, musiciens et groupes rocks venus d'Arménie et d'ailleurs, accompagnés par l'Orchestre symphonique national d'Arménie et la chorale d'enfants du diocèse de Tavush.

Ce sont plus de 100 000 visiteurs de toute l'Arménie qui sont attendus au cours de ces cinq journées inédites de sciences et de musique. Le festival est organisé en coopération avec le gouvernement de la république d'Arménie représenté par les ministères de la science, de l'éducation, de la culture, des sports et de l'industrie des hautes technologies.