Journées européennes du patrimoine: de Metsamor à Erebuni

Arménie francophone
22.09.2021

« Asseoir la puissance du pays et intimider ses ennemis ».  Ces quelques mots  gravés en caractères cunéiformes sur une stèle de basalte sont ceux d'Argishti Ier, grand roi d'Urartu et bâtisseur de la forteresse d'Erebuni, à la fin du VII e siècle avant notre ère. Elle accueille aujourd'hui les visiteurs à l'entrée du fameux site archéologique d'Erevan.

Par Olivier Merlet

Ils étaient nombreux à s'y presser à l'occasion des journées européennes du patrimoine 2021, les 18 et 19 septembre, pour profiter gratuitement de ses portes ouvertes et découvrir toutes les richesses ainsi que quelques secrets de l'histoire antique arménienne. Visites guidées, ateliers d'initiation aux fouilles archéologiques pour les enfants, expositions inédites et conférences, les musées-réserves d'Erebuni et de Metsamor, en association avec les ambassades de France et de Pologne dans le cadre de leur coopération respective, avaient concocté à l'intention du public arménien, tout un programme d'activités destiné, s'il en était besoin, à souligner la diversité de son patrimoine historique et le sensibiliser à l'importance de sa préservation.

Points d'orgue de ces deux journées, la présentation d'une reconstitution en images 3D des forteresses palatiales d'Erebuni et de Téichéïbani (Karmir Blur) à l'époque de l'âge de fer, et la présentation sur site du trésor de Metsamor, une collection de bijoux de pierres précieuses et d'or finement ciselé, en parfait état de conservation, près de 2000 ans plus tard.

La France et la Pologne coopèrent activement avec l'Arménie dans le domaine de l'archéologie et de la recherche. Deux campagnes de fouilles viennent de s'achever : celles du site de Metsamor, menées sous la direction du Docteur Krzysztof Jakubiak de l'université de Varsovie, et celles du temple de Lubsa à Erebuni, dans le cadre d'une collaboration entre les équipes arménienne et française.

L'engagement et l'action culturelle de la France en Arménie sont anciens. Pour ne parler que d'archéologie, le Ministère français de la Culture, dès 1993, délègue une première mission de reconnaissance qui aboutit en 1998 à la constitution de la "Mission archéologique franco-arménienne". Sa commission de tutelle, en charge des recherches archéologiques à l’étranger, finance aujourd'hui deux projets : la "Mission Caucase", un programme de fouilles et de recherches sur le site de Voskeblur dans la plaine d'Ararat et les cultures préhistoriques de la région, et bien sûr, la "Mission Erebuni", conjointement dirigée par Stéphane Deschamps, conservateur général du patrimoine d’Ile-de-France et le Docteur Miqayel Badalyan, directeur du musée. Les investigations portent principalement sur le centre monumental de la forteresse, ses temples urartéens et une grande salle à 31 colonnes. Elle révélera peut-être l'histoire encore méconnue du royaume d’Urartu avant son intégration dans l’Empire perse achéménide. Comme en plaisante Krzysztof Jakubiak, chef de la mission polonaise : « les découvertes archéologiques nous apportent souvent plus de questions que de réponses. »

L'ouverture au public du site d'Erebuni en ces "Journées européennes du Patrimoine", et la perspective de la rénovation de son musée à l’horizon 2023 confirment les objectifs à long terme de cette coopération française. Jonathan Lacôte, l'ancien Ambassadeur de France en Arménie ne rappelait-il pas, en d'autres circonstances, quelques semaines avant son départ, que « le patrimoine arménien est fondamentalement une composante du patrimoine de l'humanité, toute atteinte à ce patrimoine est une perte pour l'humanité tout entière. Nous savons bien sûr que le patrimoine arménien aujourd'hui est menacé, nous souhaitons être aux côtés de l'Arménie pour la préservation et la mise en valeur de ce patrimoine. »