La France médiatrice utile des conflits d'Ukraine et du Sud-Caucase

Opinions
08.02.2022

Robert Aydabirian est un ancien grand patron français, militant historique de la cause arménienne auprès des instances hexagonales et européennes. Bien connu pour son franc-parler, il adresse aujourd'hui cette tribune aux représentants arméniens de France, quelques heures avant le diner annuel auquel ils convient, comme tous les ans, le chef de l'Etat français.

« À la lumièredes médiations entamées par le Président Macron avec Vladimir Poutine, voici une note personnelle envoyée de ma part à tous ceux qui écouteront le Président de la République à partir du 8 février, sans oublier qu'à plusieurs reprises Emmanuel Macron a eu le courage de critiquer certaines postures néo-conservatrices et un alignement trop marqué sur l’OTAN.

N'empêche qu'aujourd'hui la diplomatie Française se positionne en médiateur avec la Russie. C'est bien, pour les deux pays, c'est bien pour l’Europe. Les Français essaient de mener une politique cohérente, un peu dissidente de celle des Américains. Comme ils l'ont fait avec De Gaule et Chirac en des moments critiques. Comme par exemple lors de l'invasion de l'Irak, à l'origine du chaos actuel du Proche-Orient et d'une partie de l'Afrique.

Le cas ukrainien quant à lui est une bêtise monumentale des pays d’Europe centrale et baltique. En 2014, sous leur pression l’UE est allée soutenir l'Ukraine comme un éléphant dans un magasin de porcelaine, entrainant la mort de milliers d’Ukrainiens et des pertes territoriales majeures pour ce pays, dont ses régions industrielles de l'est. L’Ukraine était à l’époque en quasi faillite. Ça ne s’est malheureusement pas amélioré depuis.

« Notre volonté est de bâtir avec la Russie le cadre de confiance permettant de préserver la paix », a déclaré Emmanuel Macron, lors d’une conférence de presse organisée après un entretien à huis-clos de plus de cinq heures avec Vladimir Poutine qui a, pour sa part, jugé utiles les discussions avec le président français. La bonne volonté française permettra-t-elle aux Européens d’avoir leur mot à dire au-delà des retours de Washington ? Nous voulons l'espérer.

Si la France réussit à se rapprocher de la Russie, comme elle l'a montré hier à Moscou, cela aura des effets positifs pour l'Arménie. Au moins y aura-t-il quelqu’un pour souffler à l’oreille des Russes qu’ils doivent en préserver la souveraineté et assurer à long-terme la sécurité des Arméniens du Karabakh.

Avec sa politique de neutralité positive, elle s'est posée avec Charles-Michel, président du Conseil européen, comme médiatrice entre Nikol Pashinyan et Ilham Aliyev, et obtenue de premiers résultats : « Huit détenus arméniens ont été remis en liberté par l’Azerbaïdjan et transférés de Bakou vers Erevan. Ils retrouvent leurs familles dont ils étaient séparés depuis plusieurs mois. Merci à nos diplomates ainsi qu’à nos militaires mobilisés dans cette opération, on avance et c'est ce qui compte ! » twittait Emmanuel Macron le 7 février.

De leur côté, les Etats-Unis de Biden influencent Erdogan pour l'amener à coopérer avec l’Arménie. Au moment des protocoles à Zurich, Mme. Clinton était très en pointe. Qu’est-ce qui a fait capoter le protocole ? La condition préalable posée par les Turcs était de régler la question du Karabagh. On n’a pas avancé sur la résolution de ce problème, les protocoles n’ont jamais été concrétisés, la question du Karabagh n’a pas été réglée, et on s’est payé la guerre des 44 jours.

Macron est un gars intelligent, qui a un certain nombre de valeurs inspirées par les philosophes personnalistes comme Paul Ricoeur, une sensibilité à cultiver et une véritable ambition internationale pour l’Europe. Le comportement vulgaire et impérialiste d’Erdogan, ça ne passe pas avec lui. Et de moins en moins avec les Français. »

 Robert Aydabirian